CNRS Paris Diderot Sorbonne Université

In memoriam Thierry Aubin


Né en 1942, Thierry Aubin obtient en Terminale C le premier Prix au Concours Général de Mathématiques. Dès sa sortie de l’Ecole Polytechnique, il décide de faire une Thèse de Mathématiques, en choisissant seul son sujet de recherche.

En 1896 Henri Poincaré avait montré que toute surface de Riemann compacte de genre supérieur à 1 possède une métrique riemannienne de courbure constante égale à -1, résultat majeur dont Poincaré déduisit aussitôt sa célèbre paramétrisation des courbes algèbriques de genre supérieur à 1 par les fonctions fuchsiennes. Rien n’était connu sur les variétés algébriques de dimension plus grande que 1 lorsque Thierry Aubin choisit d’en faire son sujet de Thèse !

Dans des mémoires préparatoires, Aubin construit une théorie locale de l’équation de Monge-Ampère complexe. Enfin, après douze années d’effort, Thierry Aubin montre en 1976 la conjecture de Calabi, c’est-à-dire que : toute variété complexe compacte de première classe de Chern strictement négative possède une unique métrique de Kähler-Einstein. Ce résultat provoqua un énorme intérêt de la communauté internationale pour la méthologie développée par Thierry Aubin consistant à résoudre des problèmes de Géométrie globale via des estimations infinitésimales de solutions d’équations aux dérivées partielles non linéaires. Parmi les inombrables continuateurs de Thierry Aubin, citons le mathématicien chinois S.T. Yau qui reçut la Médaille Fields pour avoir étendu le résultat d’Aubin aux variétés complexes compactes de première classe de Chern nulle.

Dans les années 1960 Yamabe avait énoncé que, par transformation conforme de la métrique riemannienne, on pouvait obtenir une variété à courbure scalaire constante. L’équation de Yamabe est une équation elliptique avec une non-linéarité d’exposant critique, équation que Yamabe traitait par des méthodes variationnelles; la perte de compacité ruinant la « preuve variationnelle » de Yamabe fut rapidement découverte. Les problèmes variationnels avec défaut de compacité étaient alors considérés inaccessibles. L’idée de Thierry Aubin fut d’analyser l’échec de la méthode variationelle en mettant en évidence des points où se concentraient les fonctions d’une suite minimisante. L’analyse de Th. Aubin a eu un impact considérable: elle fut à l’origine du mémoire de Brezis-Nirenberg(1983), puis de la méthode de concentration-compacité , due à P.L.Lions, si importante pour les équations non linéaires de la physique mathématique.

Son élection à l’Académie en 2003 fut soutenue par deux de nos Associés Etrangers : S.S. Chern, géomètre disciple d’Elie Cartan, Directeur de l’Institut Mathématique de Tianjin et Louis Niremberg, spécialiste des équations aux dérivées partielles non linéaires, Directeur du Courant Instititute for Mathematical Science à l’Université de New-York.

Professeur à l’Université Pierre et Marie Curie, Thierry Aubin y anime pendant trente cinq ans un Séminaire de Géométrie dont est sortie toute une Ecole; il pérennise l’influence de ce Séminaire en publiant chez Springer deux traités fondamentaux.

Texte transmis par Paul Malliavin.



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