Résume | Il est aujourd’hui reconnu que tout résultat de mesure doit contenir une indication de l’« incertitude de mesure » qui l’accompagne, sans quoi il n’est pas possible de l’interpréter ou de l’utiliser. L’incertitude de mesure est un terme quantitatif qui exprime, sous la forme d’un intervalle de valeurs numériques, un doute relatif à la validité du résultat de mesure concerné. Cependant, la signification de ce concept n’est pas tout à fait claire aujourd’hui : son calcul et son interprétation sont l’objet de discussions toujours ouvertes.
Le calcul d’une incertitude de mesure fait appel à des modèles statistiques qui permettent d’exploiter au mieux les données expérimentales collectées à propos de la grandeur mesurée. Depuis plusieurs décennies, la métrologie (la science de la mesure) est traversée par des questionnements très ouverts sur la nature des probabilités à employer dans ces modèles statistiques d’analyse d’incertitude. En particulier, l’adhésion traditionnelle à une interprétation fréquentiste des probabilités est sérieusement remise en question depuis le début des années 1970. À contre-courant de la conception traditionnelle, les textes contemporains de métrologie proposent de s’appuyer sur une interprétation des probabilités dite « épistémique », comprise en tant que mesure d’un degré de croyance.
Ma présentation visera à exposer et analyser ces débats et à identifier la façon dont ils conditionnent le rôle et la signification de l’incertitude de mesure dans la pratique scientifique. Je montrerai ainsi que les développements techniques des métrologues ont peu à peu fait émerger des problématiques épistémologiques.
|